Correcteur ? Réviseur ? Ou les deux à la fois : réviseur-correcteur ? Au féminin, « réviseuse » n’est pas très agréable, mais « correctrice » est acceptable. En tout cas, de bien grands mots assez pompeux, qu’il est difficile de vérifier. Pourquoi, sans me connaître, les gens me confieraient-ils leurs manuscrits, leurs romans, ou même leurs thèses et mémoires ? Il y a aussi la retranscription audio, encore pire : là, aucune suggestion n’est faite, il faut taper sous la dictée, en quelque sorte. Et puis, la saisie de texte n’est pas seulement mécanique, il faut pouvoir détecter les fautes de français et les constructions imparfaites.
Comment prouver que j’ai une bonne orthographe et que les auteurs peuvent me faire confiance ? Il y a belle lurette que les célèbres dictées de Bernard Pivot, avec leurs textes minés de pièges comme une plage du Débarquement, ont quitté l’actualité. Les « auspices » et les « hospices », oui, les deux sont corrects, cela dépend du sens. Pareil pour « résonner » et « raisonner ». Ils se sont succédé… sans « s ». Le b.a.-ba des amoureux de la langue française.
Donc, plus de Pivot pour dire : « Je suis arrivée en finale ». Mais il y a aujourd’hui autre chose : le certificat Voltaire. Bien. Je m’inscris. Il est mentionné que « 82 % des recruteurs sont sensibles à l’orthographe des candidats ». Après tout, moi aussi, c’est pour mon travail. Si j’obtiens ce certificat, je le mettrai sur la page d’ouverture de mon site. Ainsi, les gens auront une idée positive.
Rendez-vous à 8 heures du matin dans un lycée parisien. Devant la porte, il y a foule : uniquement des adolescents. Je suis d’abord émerveillée devant tous ces jeunes qui s’intéressent à l’orthographe, mais je comprends vite. Ils viennent pour leurs cours habituels. Nous ne restons qu’une poignée, intimidés comme les petits nouveaux de la classe. Moyenne d’âge : 30, 35 ans. Plus de femmes que d’hommes.
On nous mène dans l’amphithéâtre. Les graffitis couvrent les dos des sièges : « Léa, je t’aime » – « La prof de philo est une connasse » – « Théo, t’as une mini-bite », toute cette littérature lycéenne qui, avec une constance attendrissante, traverse les époques.
Passons aux choses sérieuses. On nous remet un dossier avec toute une série de phrases (175 !) contenant chacune une, deux, trois fautes – ou aucune. À vous de les débusquer. Trois heures pour faire la chasse. On coche. On réfléchit. On planche. On hésite. On se lance. Ah, les participes passés pronominaux… ah, les traits d’union et les accords vicieux… ah, les couleurs (robe bleue, robe bleu clair…), etc., etc. Tout y passe. Près de moi, il y a une jeune fille complètement effondrée. Comme elle a remarqué que je cochais avec plus ou moins de rapidité, elle m’envoie des regards éperdus. Elle me fait penser à Philippe Noiret qui passe son certificat d’études dans « Cinéma Paradiso ». Malheureusement, je ne peux rien pour elle : on nous a prévenus que les questions n’étaient pas imprimées dans le même ordre pour chaque questionnaire.
Je sais qu’il y a quatre niveaux d’orthographe : le 300 (technique), le 500 (professionnel), le 700 (affaires), et le 900 (expert). Je louche sur celui-ci, bien sûr, dont le descriptif est : « Recommandé pour les métiers liés aux lettres : relecteurs-correcteurs, rewriters, traducteurs, formateurs, coachs. »
Une semaine plus tard, je reçois le résultat par mail : niveau 900 dans la poche ! Avec ce commentaire en prime : « parmi les personnes ayant passé le Certificat Voltaire, 99 % ont un score inférieur au vôtre ». Le diplôme arrive ensuite par la poste. Je n’irai pas jusqu’à l’encadrer, mais ça fait plaisir.
Vous pouvez vérifier en allant sur leur site, mon code est YA74LN (ou cliquez ici)
Maintenant…. vous êtes rassurés. Vos manuscrits seront entre de bonnes mains, Voltaire veille sur moi.